Le 7 mai prochain, le Royaume-Uni tiendra ses élections générales. Dans une série de mails, Simon Usherwood, professeur en sciences politiques à l’Université du Surrey, nous en décortique les enjeux principaux.

Dear Simon,

David Cameron a promis, pour le cas où il serait réélu, d’organiser d’ici 2017 un référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne. Quelle est la probabilité que ce vote ait véritablement lieu ? Et s’il est organisé, est-il possible de pronostiquer son résultat ?

Pour beaucoup d’Européens du continent, cette question de l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union européenne est peut-être le problème le plus pressant des élections générales. Malheureusement, ces élections ne risquent guère d’y apporter une solution.

Il y a toute une série d’obstacles qui se dressent devant un tel référendum.

Tout d’abord, il faudrait que les conservateurs gagnent les élections sans conteste, avec une majorité absolue. Car n’importe quelle coalition susciterait forcément des marchandages ce sujet.

Ensuite, puisque Cameron a promis de soumettre à référendum une adhésion à des conditions renégociées, il faudrait qu’il obtienne le soutien d’une majorité d’états-membres de l’Union pour ouvrir une telle renégociation du Traité, ce qui est très peu probable. Soit celle-ci traiterait d’aspects très mineurs et ne changerait pas grand-chose aux principes, soit elle ouvrira des débats fondamentaux sur la nature même de l’Union (notamment le principe de libre circulation) qui pourraient s’éterniser pendant des années et dans lesquels la plupart des états-membres n’ont aucune envie de s’engager. Ce n’est qu’au terme de telles négociations pénibles qu’un référendum pourrait être raisonnablement être organisé. Car si elles étaient encore en route, le fait que le Royaume-Uni se mette à organiser un vote décisif serait mal perçu et n’aiderait guère le pays dans ses rapports avec ses partenaires.

Et tout cela pour un problème que la grande majorité des Britanniques ne considèrent pas comme étant le plus important ? Cameron serait obligé d’investir énormément de capital politique pour ce référendum, sans pouvoir espérer d’en tirer grand bénéfice, quel que soit le résultat.

Et même si le référendum avait lieu, la question européenne serait loin d’être résolue : si les Britanniques décidaient de rester, seraient-ils pour autant satisfaits de l’état de l’Union ou se mettraient-ils aussitôt à réclamer d’autres réformes ? S’ils voulaient partir, les négociations sur les modalités exactes de leur sortie ne feraient que commencer et pourraient durer des années. Pendant que le parti perdant, quel qu’il soit, continuerait à coup sûr de se battre bruyamment pour sa cause…

Certes, en ce moment, tous les indicateurs suggèrent qu’un vote serait en faveur du maintien du Royaume-Uni dans l’Union. Mais nous risquons d’attendre un bon moment avant de le voir confirmé dans les faits.

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Simon Usherwood est politologue, il enseigne les études européennes à l’Université du Surrey. Spécialiste des partis politiques britanniques, il est l’auteur d’un blog remarqué sur l’euroscepticisme.

 

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